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Des enfants nés aveugles peuvent enfin voir la lumière grâce a une simple pilule mise au point à l'Université McGill. Il s'agit du premier traitement oral au monde contre la forme la plus grave de cécité infantile.
Des enfants nés aveugles peuvent enfin voir la lumière grâce a une simple pilule mise au point à l'Université McGill. Il s'agit du premier traitement oral au monde contre la forme la plus grave de cécité infantile.
«Papa, c'est quoi ces lumières dans le ciel?» À sept ans, Hen Yu Wang est émerveillée pour la première fois devant les feux d'artifice du Nouvel An chinois. Quelques mois plus tôt, la fillette aurait été incapable de voir la moindre étincelle. Elle était presque aveugle.
C'était avant de rencontrer le Dr Robert Koenekoop, directeur du Laboratoire de génétique oculaire à l'Hôpital de Montréal pour enfants du CUSM.
Pour venir rencontrer l'éminent spécialiste, son père Wifu Wang, un simple fermier du nord de la Chine, a voyagé avec elle pendant 12 h en train jusqu'à Beijing, puis 18 h en avion jusqu'à Montréal.
Maladie incurable
Le seul espoir du modeste producteur d'arachides était que sa fille puisse bénéficier du tout premier traitement expérimental au monde contre l'amaurose congénitale de Leber.
Heng Yu est atteinte de cette forme grave de cécité infantile qui touche environ 10 000 personnes au Canada. Elle est née avec et sans le Dr Koenekoop, elle n'en aurait jamais guéri.
Quand le médecin a commencé à s'intéresser à la maladie, en 1995, il aurait été impensable de soigner ce mal héréditaire.
C'est à cette époque que Nathalie Fex a rencontré le spécialiste du CUSM pour la première fois. À 22 ans, la jeune Montréalaise ne voyait pratiquement rien. Elle était ressortie du cabinet du médecin sans même rêver pouvoir un jour abandonner sa canne blanche.
«Il n'y avait pas d'espoir de traitement parce que nous pensions que les cellules rétiniennes mourraient très rapidement après la naissance», indique le Dr Koenekoop, qui enseigne la génétique humaine, la chirurgie et l'ophtalmologie pédiatrique à l'Université McGill.
Réveiller les cellules
Près de 20 ans plus tard, le scientifique a démontré que la science s'était trompée. «Les cellules peuvent simplement être en dormance pendant des années avant de mourir, explique-t-il. Le médicament que nous avons administré aux patients a activé les cellules.»
Le traitement est une thérapie génétique qui consiste à avaler une simple pilule par jour pendant une semaine. Ce comprimé contient une molécule rétinienne synthétique qui va activer la molécule en dormance dans l'œil.
Effet presque immédiat
L'effet est spectaculaire et quasi immédiat. Après seulement sept jours, le champ de vision de la petite Hen Yu s'est élargi et le flux sanguin a augmenté dans ses yeux. Au bout de quatre mois, le champ de vision de l'enfant n'a rien de moins que doublé.
Dix des 14 patients, âgés de 6 à 38 ans et venus de cinq pays, qui ont participé à l'étude ont obtenu des résultats similaires. Aujourd'hui, Nathalie Tex est capable de cuisiner seule et de jouer aux cartes. «J'ai même pu écrire un message à la main au Dr Koenekoop!» se réjouit-elle.
Publiés aujourd'hui dans la prestigieuse revue Lancet, les résultats de l'équipe de McGill devront maintenant passer deux autres phases de recherches et d'approbation avant que le médicament ne se retrouve sur les tablettes des pharmacies. «Ça devrait prendre deux ans, j'espère que ça ne sera pas trop long pour les patients», souffle le Dr Koenekoop.